Projet de gestion de l'énergie

La conception bioclimatique et énergétique des bâtiments de Clichy-Batignolles a été encadrée de très près. Aujourd’hui, on peut affirmer que les performances annoncées atteignent des objectifs de consommation et d’émission de carbone très ambitieux. Quant aux performances réelles… Elles dépendront en grande partie des utilisateurs des bâtiments. La question des usages, qui échappait jusqu’à maintenant aux compétences de l’aménageur, mérite toute son attention.

La problématique

Comment l’aménageur peut-il agir sur la performance énergétique du quartier ?
Sobre en énergie et desservi par une boucle locale de chaleur alimentée par géothermie, avec l’ambition de tendre vers un bilan carbone neutre, Clichy-Batignolles sera sans doute l’un des écoquartiers européens les plus performants dans ce domaine. Pour inciter les opérateurs immobiliers à atteindre les performances voulues (plus élevées que la réglementation parisienne), les cahiers des charges de prescriptions environnementales ont été enrichis d’outils méthodologiques à l’intention des maîtrises d’œuvre, et accompagnés d’un dispositif de contrôle strict. Paris & Métropole aménagement fait ainsi évaluer les performances théoriques des bâtiments tout au long du projet, jusqu’à la livraison1.

Et après ?
Après vient le moment où il faut quitter la modélisation prévisionnelle pour la mesure réelle de la consommation, de la production photovoltaïque et du mix énergétique du quartier “en exploitation”, quand entreprises, commerces, gestionnaires d’équipement public et habitants ont pris possession de leurs locaux et des installations énergétiques à leur disposition. C’est la seule façon de s’assurer que la performance voulue est effectivement au rendez-vous. Or des mesures ciblées sur les premiers immeubles livrés sur le secteur Est ont montré que l’utilisation des bâtiments génère une consommation supérieure aux prévisions. Très ambitieuses, celles-ci impliquent en effet des comportements coordonnés et rigoureux de la part des occupants, des fournisseurs d’énergie, des syndics de copropriétés ou encore des exploitants. Atteindre les objectifs énergétiques de l’écoquartier implique donc de sensibiliser ces différents groupes à la nécessité d’adapter leurs pratiques.


Périmètre du projet CoRDEES © Emmanuel Labard + Antonin Bertrand / Designers Unit

1. Une garantie financière équivalant à 4 % du montant de la charge foncière est placée sous séquestre pour être restituée à l’issue du diagnostic de livraison attestant du respect des prescriptions.

Le déclencheur

Une aide de l’union européenne pour développer une « action innovatrice urbaine »
Fin 2016, la Ville de Paris, Paris & Métropole aménagement et leurs partenaires Embix, Une Autre Ville et Armines ont été lauréats d’un appel à projets de Actions Innovatrices Urbaines (UIA en anglais), une initiative de l'Union européenne pour aider les collectivités à faire face aux nouveaux défis urbains. Le projet, appelé CoRDEES2 consiste à placer la responsabilité des questions énergétiques, en phase d’exploitation, entre les mains d’une Gouvernance énergétique de quartier assistée d’un facilitateur énergétique. CoRDEES porte sur une partie de l’opération d’aménagement, le secteur Ouest engagé plus tardivement le long du faisceau ferroviaire Saint-Lazare. Un financement de 4,3 M€ est apporté par le FEDER (Fonds européen de développement régional), soit 80 % du budget total de 5,4 M€, sur une durée de 3 ans (jusqu’à octobre 2019).

2. Co-responsibility in district energy efficiency and sustainability

L'idée

L'idée est d'instaurer un régime de co-responsabilité énergétique durable à l’échelle du quartier. La performance énergétique a d’abord été l’objet d’engagements réciproques entre les acteurs impliqués dans la conception et la construction de l’écoquartier : la Ville de Paris, Eau de Paris3 et la Compagnie parisienne de chauffage urbain (CPCU), les promoteurs immobiliers, les bailleurs sociaux et certains acquéreurs institutionnels en VEFA.

Au fur et à mesure de la livraison des bâtiments, apparaissent d’autres acteurs dont les comportements deviennent déterminants, mais qui ne sont liés par aucun engagement contractuel touchant à la performance énergétique : 

  • Les acquéreurs des biens immobiliers, particuliers ou institutionnels
  • Les copropriétés, les gestionnaires des bâtiments, les syndics
  • Les utilisateurs des bâtiments : particuliers, entreprises ou services publics
  • Les fournisseurs ou acheteurs d’énergie.

Inversement, les principaux acteurs initiaux vont “quitter la scène” : 

  • Les promoteurs immobiliers quand ils auront vendu leurs programmes 
  • L’aménageur et la Ville de Paris4 au terme de la concession d’aménagement de la ZAC

Cet ensemble évolutif, que nous appelons les parties prenantes, doit être structuré et ses membres responsabilisés de manière individuelle et collective si nous voulons maintenir dans la durée l’ambition de départ. C’est pour cela que nous avons imaginé cette notion de gouvernance énergétique de quartier : c’est l’instance qui associe et engage les parties prenantes à viser des objectifs de performance énergétique. Nous disons bien viser et non atteindre, car le dispositif n’est pas coercitif.


La dynamique attendue © Emmanuel Labard + Antonin Bertrand / Designers Unit

3. Eau de Paris a construit et exploite l’installation de géothermie de Clichy-Batignolles qui alimente le réseau de chauffage urbain géré par CPCU, concessionnaire de la Ville.

4. La ville de Paris reste présente en tant que gestionnaire des services publics.

L'outil

Un facilitateur énergétique, opérateur d’un genre nouveau
Il est créé pour aider la gouvernance à atteindre ses objectifs. L’instauration d’une gouvernance énergétique de quartier suppose l’intérêt objectif des parties prenantes à y participer. On n’est plus dans la situation initiale d’une vente de charges foncières permettant à l’aménageur d’imposer des conditions. Certes, les parties prenantes ont un intérêt objectif à la performance énergétique de leur propre bâtiment, qu’il soit d’ordre économique ou éthique, mais à des degrés divers. En outre, comment les intéresser aux performances énergétiques du quartier, sujet qui concerne d’abord la ville et l’aménageur ?

Notre démonstration
La démonstration que nous voulons apporter par ce projet est que l’échelle du quartier permet d’élever l’efficacité des efforts individuels vers la performance.
Au stade actuel de la réflexion, les véhicules juridiques et les outils contractuels restent à imaginer, mais l’intention est assez bien exprimée par le terme de facilitateur. C’est le nom que nous donnons à l’entité à créer pour porter l’ensemble des outils et des services mis à la disposition de la gouvernance, à savoir :

  • Création d’un smart grid. Le facilitateur équipe les bâtiments et les équipements énergétiques de capteurs dont les données, ainsi que celles des compteurs existants, sont transmises à une plateforme numérique.
  • Développement d’une plateforme de gestion énergétique collaborative. Le facilitateur crée l’outil numérique permettant à chaque acteur local de prendre gratuitement connaissance des données du quartier et des données le concernant, en particulier des écarts de performance et des alertes.
  • Prestation de services. Grâce aux données de la plateforme, mais aussi à l’existence de la communauté des acteurs énergétiques du quartier, le facilitateur apporte des services complémentaires tournés vers l’amélioration des performances, sans toutefois se substituer aux gestionnaires.

La démarche
Le facilitateur est aussi le tiers de confiance, le garant du bon fonctionnement de la gouvernance. C’est lui qui fait respecter les règles de transparence, d’équilibre des engagements, de confidentialité des données individuelles. Pour le moment, ce sont les partenaires associés dans le consortium CoRDEES qui se partagent ces différents rôles. Le soutien de l’Union européenne permet, dans un premier temps, de développer une offre de services gratuite pour les bénéficiaires, étant entendu que le facilitateur devra in fine s’auto-financer. La démarche consiste à prototyper le dispositif pour le tester, dans l’intention de pouvoir le répliquer sur d’autres opérations d’aménagement si l’expérience est concluante.

Documentation liée

  • Société

    Façons de Faire #1

    05.03.2018 Plaquettes professionnelles 6.57 Mo

  • Clichy-Batignolles

    Lauréat du Grand Prix «Ville durable» d'un concours international

    15.11.2016 Communiqués de presse 127.85 Ko